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Mme Badiha Nahhas, chercheur: « La préservation de la mémoire : adopter une approche créative et éviter le passéisme »

Entretien avec Mme Badiha Nahhas, chercheur au Centre marocain des sciences sociales, à l’Université Hassan II-Casablanca

Quelle est à votre avis la place de la mémoire du rif dans le processus de préservation de la mémoire collective ?

Le Rif fait partie des régions classées par l’IER comme les régions qui devaient bénéficier de la réparation communautaire. C’est dans ce cadre qu’il bénéficie de ce programme sur lequel travaillent plusieurs associations.La particularité de la région réside dans le fait que la population du rif n’a eu de cesse d’attirer l’attention sur les graves violations des droits de l’Homme dont a souffert cette région durant les années de plomb et de revendiquer des projets qui répondent aux attentes.de la région.
La mémoire du rif a une certaine particularité. C’était une mémoire douloureuse faite d’accumulation d’événements tragiques. Une mémoire marquée par une forte revendication des rifains qui mettent en avant la particularité de l’identité locale et le respect de cette identité.
C’est pourquoi la question de la réconciliation ou de la réintégration de la mémoire régionale dans le cadre de la mémoire nationale est un réel défi et c’est un processus qui est encore long.

Comment on peut préserver la mémoire et transmettre les valeurs de la réconciliation aux nouvelles générations ?

Actuellement, les associations qui travaillent sur la mémoire et le patrimoine le font dans une optique de passéisme. Elles travaillent plus sur le passé que sur le futur. Peut être que c’est une façon de transmettre des valeurs et de valoriser le patrimoine et l’histoire de la région, mais je pense qu’il faut sortir de ces lieux un peu sélectifs, aller vers le grand public, simplifier les concept et adopter de nouveaux supports pédagogiques plus ludiques.
Dans ce cadre, quelles sont vos propositions pour le musé du rif?
Lorsqu’on adopte l’approche de muséification on tombe parfois dans cette forme de passéisme Aussi, il faut repenser la relation entre la mémoire et la société afin que la mémoire ne soit pas figée. La mémoire est évolutive, il ne faut donc pas l’envisager dans le cadre d’un musé traditionnel mais un musé plutôt ouvert et adapté à la réalité et la particularité de l’histoire de la région en veillant à associer les acteurs associatifs dans ce projet.

Est-ce que le débat sur la mémoire et la proposition de créer le musé du rif est une forme de consécration du processus de réconciliation ?

Je suppose que dans certaine mesure oui. Le débat sur la mémoire a émergé à partir des années 2000, particulièrement avec la création de l’IER. Cependant, après la publication du rapport final de l’instance, des voix ont commencé à s’interroger sur l’intérêt de cette réconciliation, jusqu’à affirmer que le rif n’a pas eu sa place dans les travaux de l’IER. Mais je pense qu’on commence à dépasser cette phase et si on décide de s’engager dans cette question de patrimonialisation, de préservation et de valorisation du patrimoine et de création d’un musé, cela posera un nouveau jalon vers la consolidation de la réconciliation

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